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Conscience féminine & Écothérapie : La renaissance du principe Féminin & le féminin sacré

La Renaissance du Principe Féminin

Encore à l’université déjà, avant même de devenir psychothérapeute, et comme je commençais à m’intéresser à la psychologie des profondeurs de CG JUNG, à parler avec d’autres jeunes femmes sur leur propre développement psychologique et spirituel, j’ai pris conscience que les enseignants spirituels et psy qui m’avaient bercée et accompagnée avaient peu de choses à me transmettre spécifiquement en tant que femme.

J’en vins à considérer mon expérience et celles d’autres femmes pour envisager une compréhension du développement spirituel et psychologique des femmes.

Voici les questions qui me taraudaient alors :

  •       Que veut dire être une femme dans un monde d’hommes pour celles d’entre nous qui ne désirent pas se battre dans ce monde compétitif ?
  •       Pourquoi tant de femmes engagées dans des unions conventionnelles, rompues aux contraintes conjugales et au poids d’avoir à ressentir pour deux, sont-elles du jour au lendemain si agressives et initient-elles de nombreux divorces ?
  •       Pourquoi des femmes expriment-elles une déception profonde par rapport à la réalité d’une carrière réussie ainsi qu’avec les promesses du féminisme, jusqu’à dire qu’elles en ont oublié d’être une femme ?
  •       Pourquoi tant de femmes se précipitent pour avoir des enfants relativement tard dans leur vie, pour être sûres qu’elles ne passent pas à côté de cette expérience féminine quintessentielle ?
  •       Pourquoi l’intérêt est-il si grand dans la spiritualité « féminine » ? Qu’est-ce qui fait cruellement défaut dans nos religions patriarcales ? Et que se passe-t-il aujourd’hui dans les formes émergeantes du développement personnel en lien avec cette « spiritualité » ?

Enfin une autre question plus récente dans mon parcours fut la suivante. 

  •       Et si les jeunes femmes et femmes présentes dans mon cabinet et se plaignant de manque d’estime de soi, de manque de confiance en soi, ne souffrait pas essentiellement, en dehors de considérations existentielles toujours marquantes, d’une absence de modèles féminins inspirants pour se définir, se situer et se développer ?

Les réponses à la plupart de ces questions se trouvent dans le désir des femmes à être authentiquement « féminine », et en même temps, d’être une femme autonome jouissant de pouvoir et d’autorité.

Ce désir, dans notre culture, est difficilement réalisable, car une femme ne peut être un adulte sain et une femme idéale dans le même temps. Une évidence !

Il existe une vision évolutive qui permet de comprendre les mécanismes à l’œuvre en ce qui concerne le développement des femmes qui est en lien avec la dynamique plus globale de l’évolution humaine. Cette dynamique semble avoir une direction et un objectif, un déploiement ordonné.  En fait le développement psychologique individuel récapitule le développement entier de l’espèce en plusieurs étapes.

Considérons cette évolution en trois étapes.

Étape 1 : Conscience matriarcale

A cette étape de conscience, chacun.e est né.e d’une femme. Nous nous développons en relation à une mère historique et personnelle, au cœur d’une enveloppe, d’un monde de sentiments et de sensations. Dans cet univers clos, qui est souvent référé comme étant de nature participative et mystique, nous n’avons pas encore de frontières autour de Soi, pas de division entre le « moi » et le « non-moi », le « soi » et « l’autre ». 

Comme les individus, les cultures s’enracinent dans ce que nous pouvons appeler, l’archétype de la Grande Mère. Les individus vivent en petites tribus ou clans proches de la terre, leur identité est contenue à l’intérieur du groupe. Certains archéologues et historiens croient que ces peuplades vénéraient une déesse féminine et n’avaient aucun goût pour la guerre.

Cette étape du développement à la fois individuel et collectif, archaïque et indifférenciée, personnifie le principe féminin inconscient, instinctif. Nous pouvons observer cette forme dans les cultures primordiales contemporaines, pour lesquelles le groupe est plus important que l’individu, et au sein desquels la relation des individus avec la nature est reliée à leur relation au divin. 

La qualité mythique et mystique de ces cultures se perçoit dans le sens d’unité qu’elles entretiennent avec la nature. Certains enquêteurs ont suggéré que des récits comme le mythe du Jardin d’Eden et d’autres paradis pourraient venir de cette époque encore peu connue de la préhistoire où cet état de conscience matriarcale prédominait.

Étape 2 : Conscience patriarcale

Inévitablement, à cette étape, les individus se désolidarisent du groupe contenant et de l’archétype de la Mère Inconsciente. Ici le sens d’une identité individuelle se développe. Ainsi, une tout nouvelle structure sociale émerge, avec forces croyances et coutumes. Une nouvelle façon de penser émerge basée sur l’importance de se différencier les uns des autres, de différencier le sujet de l’objet, la partie du tout. Nous passons ici d’une participation mystique à une objectivité analytique.

Nous savons peu de choses quant à ce changement de paradigme du matriarcat au patriarcat, mais nous en connaissons l’issue, le patriarcat, une forme d’organisation sociale dans laquelle le père ou le mâle référent est reconnu comme le chef de la famille ou de la tribu, et la descendance et parenté se définissent au travers de la lignée mâle. Ici règnent l’individualisme, le héros qui se bat pour être dominant au détriment de la communauté, et la croyance très répandue jusque dans les inconscients que les hommes et le principe masculin ont plus de valeur que les femmes et le principe féminin.

Ce changement de paradigme culturel se reflète dans le développement des individus quand la personne commence à se séparer d’un lien inconscient avec la mère pour gagner en autonomie et des limites égotiques saines. Cette étape dans la psychologie jungienne correspond au voyage du héros hors de l’Inconscient quand celui-ci vient trancher la tête du dragon et qu’il peut enfin trouver son pouvoir personnel. Cette étape démarre vers l’âge d’un an et est comme une deuxième naissance. Elle peut se poursuivre un certain temps.

Les individus ici sont gouvernés par l’Archétype du Père, dont les caractéristiques sont l’action, la volonté, l’analyse, l’effort et la compétition. Cette étape devient alors un modèle du processus global de la prise d’autonomie. L’enjeu est de quitter ses parents et apprendre à se prendre en charge tout autant que de prendre soin de soi, pour manifester l’apparence au moins d’être « indépendant » dans toutes les sphères de la vie.

Mais psychologiquement, profondément, beaucoup d’entre nous ne se sont pas séparés de leurs parents ou des attendus stéréotypés de la société. Nous avons appris de Sigmund Freud, d’Alice Miller, de Donald Winnicott, de Didier Anzieu, Erik Erickson, et bien d’autres, etc… que la plupart des individus ne développe pas d’egos pleinement équilibrés ni même d’un sens d’une individualité réelle dans notre société : nous sommes dysfonctionnels de façon évidente sans nous en apercevoir bien souvent. Nous continuons à porter père et mère en nous, leur projet pour nous ou reproduisons leur schéma en copiant le leur ou en nous rebellant, croyant que nous rompons avec eux alors que le piège s’est refermé sur nous.

Pour les femmes, qui puisent leur identité à la source Mère si je puis dire, ce processus se déploie ainsi : nous nous identifions à nos mères comme notre origine, biologiquement et psychiquement. Ainsi, pour être une femme, nous avons besoin de faire face au paradoxe de rompre avec cette identification tout en restant ancrées dans le féminin.

Pour les hommes, qui puisent leur identité à la source Père, le besoin de se battre pour se libérer de la mère est d’une importance majeure. Ils quittent le féminin pour s’enraciner profondément dans le masculin.

Et malheureusement, pour presque tout un chacun, les blessures de l’enfance restent vives. Blessures que nous amenons dans nos relations amoureuses, dans l’attente que l’autre prenne soin du travail que nous n’avons pas fait nous-mêmes.

Je pense comme bon nombre de psychothérapeutes et analystes que cela est dû en grande partie parce que l’on ne nous apprend pas qu’à cette étape patriarcale de l’évolution, le développement psychologique d’un ego sain et différencié demande voire exige un effort conscient de notre part. Sans ce travail qui se fait avec un psy, guide ou mentor et qui consiste à soigner nos blessures, l’ego sain ne peut pas se développer de lui-même et reste ainsi à l’état d’enfance.

Etape 3 : Conscience émergente

Longtemps, philosophes et psychologues ont pensé que l’étape du patriarcat et d’un ego « séparé » différencié était l’enjeu de l’évolution humaine et une fin en soi. 

Cependant, aujourd’hui, nous sommes nombreux/ses à considérer les déboires d’une société patriarcale et l’émergence d’une nouvelle conscience.

Deux courants ont permis cette transition culturelle du patriarcat vers un renouveau : le féminisme et l’étude des cultures primordiales.

Le féminisme a analysé en profondeur et de manière rigoureuse les stéréotypes de genre et mis en évidence l’oppression des femmes et du genre féminin. Des luttes ont permis des prises de conscience au travail, dans les relations intimes et dans l’éducation. Les changements sont en cours.

Le féminisme a aussi été un catalyseur pour découvrir l’esprit de sororité. Cela a permis aux femmes de faire en sorte que les hommes et le masculin soient moins une priorité voire une obsession dans leurs vies, une révélation pour celles d’entre nous élevées dans le but de trouver et de « gagner » l’homme par-dessus tout, en compétition avec d’autres femmes. 

Le féminisme a aussi ouvert le champ de la réflexion et le besoin pour les femmes de redéfinir leur pouvoir et leur langage.  Des pans entiers de l’histoire ont été réécrits qui incluent l’histoire des femmes. Des études ont mis en évidence à quel point le langage lui-même était discriminant à l’endroit des femmes…et du féminin.

Le deuxième axe qui a permis ce retournement est la découverte de cultures pre-patriarcales basées sur des valeurs féminines. Ces chercheur.e.s ont découvert que ce que nous tenons pour acquis aujourd’hui – la famille nucléaire et son chef de famille, les monothéismes et leurs dieux masculins- sont des constructions somme toute récentes dans l’histoire de l’humanité.

Nous pouvons donc imaginer de nouvelles et riches alternatives pour le futur.

Le prix à payer toutefois semble grand. Beaucoup le relie au désastre écologique auquel nous sommes confronté.e.s aujourd’hui parce que nous nous sommes déconnecté.e.s d’un lien précieux et nourricier à la terre. De cette rupture première, d’autres ruptures ont suivi. Les femmes en auraient perdu leurs pouvoirs instinctuels et se seraient soumises, soumettant de ce fait le principe Féminin. Le Divin, en lien avec la nature et le corps humain, dans des temps très reculés, fut banni du royaume céleste, reléguant au profane ce qui était considéré comme sacré.

Beaucoup sont fasciné.e.s aujourd’hui par les peuples premiers, les chamanismes et ce qu’ils peuvent nous apprendre sur le sujet : comment vivre en accord avec la terre et l’honorer. Mais nous ne pouvons retourner en arrière. Nous ne pouvons que trouver là une grande ouverture et inspiration pour exhumer nos valeurs profondes et renouveler notre relation à la terre et au divin de manière plus consciente et vivifiante, emmenant avec nous les présents du développement que la société patriarcale nous a permis : une individualité bien construite, nos esprits curieux et dotés de capacités d’analyse certaines.

Ainsi, le développement de l’ego ne serait qu’une étape dans un processus de maturation bien plus grand. Grâce au travail pionnier du psychologue humaniste Abraham Maslow, et du philosophe Ken Wilber, nous pouvons imaginer de nouvelles élévations.

Nous pratiquons de plus en plus de disciplines spirituelles pour attendrir un ego encore trop volontaire, privilégiant les objectifs et la performance. Pour la première fois dans l’histoire, au cours des 30 dernières années, les expériences transpersonnelles se sont démocratisé.e.s et sont accessibles au plus grand nombre.

Un monde se meurt, à mesure qu’il devient clair que le système patriarcal et son système institutionnel ne peut pas soutenir la vie sur terre. Parallèlement, les valeurs féminines se font entendre haut et fort, dans le but d’apporter un équilibre au système. Nous sommes dans une crise profonde et en pleine mutation.

Au niveau individuel, l’archétype féminin sussure à la conscience de l’ego qu’il n’est plus seul, dominant. Beaucoup de psychothérapeutes sont les témoins de cette transition. Jean Houston explique que le mouvement des femmes peut être la manifestation extérieure de ce qui se joue à un niveau plus profond dans un espace-temps mythique, archétypal et essentiel. La carte des valeurs se redessine et nous ne savons pas exactement ce qui est à l’origine de cela.

Culturellement, cela veut dire la fin d’un féminin dévalué et d’un masculin surévalué. Psychologiquement, cela veut dire qu’être femme, c’est honorer le féminin, et cesser les identifications au principe masculin de type patriarcal, car l’identification ne permet pas la relation.  Cela veut dire redéfinir les valeurs du féminin mais aussi les valeurs du masculin.

Ici débute le voyage vers plus de conscience féminine pour les hommes comme pour les femmes.  

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